LA GÉOMÉTRIE
               
              ... On part d'un point très clair, et, de degrés 
                en degrés, on s'engage dans l'obscur, qui s'illumine à 
                son tour en irradiant de nouvelles clartés pour une ascension 
                supérieure. Cette invasion progressive du connu vers l'inconnu, 
                cette lanterne scrupuleuse éclairant ce qui suit des clartés 
                de ce qui précède, c'était là vraiment 
                mon affaire.
              La géométrie devait m'apprendre la marche logique 
                de la pensée; elle devait me dire comment le difficile 
                se subdivise en tronçons qui, élucidés l'un 
                après l'autre, se groupent en levier capable d'ébranler 
                le bloc directement invincible; comment enfin s'engendre l'ordre, 
                base de la clarté.
              Si jamais il m'a été donné d'écrire 
                quelques pages parcourues du lecteur sans trop de fatigue, je 
                le dois pour une bonne part à la géométrie, 
                merveilleuse éducatrice dans l'art de conduire sa pensée. 
                Certes, elle ne donne pas l'idée, fleur délicate 
                éclose on ne sait comment et non apte à prospérer 
                dans tous les terrains; mais elle coordonne l'embrouillé, 
                elle émonde le touffu, elle calme le tumultueux, elle filtre 
                le trouble et donne le clair, produit supérieur aux tropes 
                de la rhétorique. ...
               
              
                A. Rencontre de la combinatoire
                C. Les coniques
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